Belles latinas

Belles Latinas 2023

Par PATRICIA PATRUNO, publié le jeudi 16 novembre 2023 09:04 - Mis à jour le mercredi 13 décembre 2023 08:34
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Cette année, le lycée Carnot reçoit deux écrivains : Fernanda Trias et Jean-Christophe Potton et un dessinateur : Gervasio Troche

Voir le programme en fichier joint.

Comme chaque année, Mme Maryline Dubruc (professeure d'Espagnol, section Euro) a organisé la venue d'auteurs à l'occasion des Belles Latinas. C'est cette année la 22e édition de ce festival littéraire organisé par Nouveaux Espaces Latinos.

La première invitée est l'écrivaine uruguayenne Fernanda Trias qui est aussi professeure de création littéraire à l'université de Bogota.

Deux de ses romans ont été choisis pour la rencontre de Carnot : La Ville invincible (2020) et Crasse rose (2023). Cette rencontre avec les élèves de la section Euro (Mme Dubruc) et les Terminales spécialité Humanités, Littérature et  Philosophie - HLP- (MM Brun et Giraudier) a eu lieu mardi 14 novembre 2024 de 8h à 10h.

Fernanda Trias a d'abord présenté son parcours. Née à Montevideo, sous la dictature, elle a vécu dans de nombreux pays, en Europe (France où elle a été en résidence d'auteur, Berlin) puis  est revenue sur le continent américain pour s'installer à Buenos Aires, New-York et enfin Bogota où elle réside actuellement.

Ensuite elle a répondu aux questions des élèves concernant l'acte d'écrire, ses inspirations, les traductions, les éditions, ses histoires.

Avant d'écrire, elle a surtout beaucoup lu, lecture qui lui permettait de se sentir moins seule. Elle a commencé à écrire pour communiquer avec des lecteurs comme elle, elle voulait reproduire ce qu'elle avait ressenti par la lecture. Elle écrit des livres d'autofiction ou d'autres plus imaginaires (comme Crasse rose - science-fiction).

Pour elle, "écrire est un chemin d'auto-connaissance".

En ce qui concerne la traduction, elle est souvent obligée de faire confiance... Mais pour l'édition française, elle a pu lire et demander des rectifications (des erreurs qui donnaient lieu à des problèmes de compréhension) à sa traductrice (qui est toujours la même). C'est cette dernière qui a proposé les livres de Fernanda Trias aux éditeurs français.

 

La Ville invincible se situe à Buenos Aires, ville cosmopolite (Européens mais aussi de Latinos de plusieurs pays) où elle a vécu. Elle était étrangère en Argentine mais contrairement à l'Europe, elle parlait la même langue et avait le même accent (Vénézuela voisin de l'Argentine).

Sur l'histoire : www.espaces-latinos.org/archives/96538

Crasse rose, dystopie, a été écrit avant la pandémie de coronavirus et pourtant on y retrouve des aspects d'un quotidien que nous avons connus : quarantaine, confinement, la peur des autres, l'angoisse, l'incompréhension devant la maladie, la surveillance de la population...

Un étrange nuage toxique propage une dangereuse épidémie. Nous suivons la narratrice dans une ville portuaire d'Amérique du sud qui agonise avec cette pollution et cette maladie étrange. Ses relations affectives sont également en pleine décomposition entre un ex-mari malade, une mère peu compréhensive et un enfant (dont elle s'occupe) atteint d'une maladie génétique.

L'ambiance du récit est particulière, oppressante. Comme on peut ressentir sous une dictature  qui ne se voit pas toujours mais dont la menace est omniprésente.

Pour Fernanda Trias, notre époque est anxiogène avec cette peur des dangers climatiques, la crise économique, les fake news, les théories du complot... De plus, les relations humaines semblent de plus en plus compliquées...

En fin de séance, l'écrivaine a dédicacé ses livres aux élèves.

 

 

Les 27 et 28 novembre 2023, Gervasio Troche est le deuxième invité de Mme Dubruc. Il intervient 3 fois de suite auprès des élèves de Carnot. Deux rencontres-ateliers se sont déroulées en salle de classe avec les élèves d'Espagnol Euro. Après environ 1heure d'échanges, les élèves ont dessiné  sur un sujet donné par Gervasio Troche- pluie- qui lui-même utilisait le tableau. Cette activité a donné lieu à un bel échange avec les élèves.

Le mardi 28 de 8h à 10h, en salle Hippolyte Carnot, le dessinateur a rencontré des élèves d'Euro mais également des Terminales spécialité HLP avec leurs enseignants, MM Brun et Giraudier.

M. Brun a demandé à ses élèves d'écrire des textes à partir de certains dessins issus des albums de l'auteur (il en a donnés à G. Troche).

Quant à M. Giraudier, lui-même dessinateur, il a remercié Gervasio Troche en lui offrant une de ses planches originales, encadrée. Ce geste a été très apprécié.

Gervasio Troche est né en Uruguay. Ses parents artistes (poète et clown), après un temps en prison, ont dû fuir la dictature dans les années 70. Ils sont passés par l'Argentine puis se sont réfugiés en France pour quelques années. A la fin de la dictature (années 80), la famille revient en Uruguay. Gervasio est resté nostalgique de la France. Il a pû revenir en France grâce à l'association Nouveaux Latinos (2015).

Il dessine depuis enfant. Mais il ne vit du dessin que depuis 5 ans. Il a commencé à créer un blog en 2009 mais en même temps, il travaillait à l'usine. Depuis, il a publié 3 albums. Deux sont mis à l'honneur à Carnot : Equipage et Dessins invisibles. Equipage est l'album le plus triste selon lui car il correspond à une période plus difficile dans sa vie.

C'est lui qui choisit tous les dessins de ses albums ainsi que leur ordre d'apparition. En revanche, il ne peut pas les commenter ou donner un titre aux albums, il a un problème avec l'écrit, ce sont donc d'autres (sa mère, un ami... )qui le font.

Il travaille peu pour les autres car pour lui le dessin est intime, trop personnel. Il a besoin de se connecter complètement avec la personne qui demande le dessin...

Il dispense également des cours de dessin.

Le style de Gervasio Troche est épuré, sans fioriture. Un tracé simple, en noir et blanc et pourtant empreint d'une grande poésie. En admirant les dessins de ses albums, on mesure effectivement l'implication personnelle de l'auteur dans ce moyen d'expression et de communication. On comprend également ses influences (les dessinateurs Sempé et Saul Steinberg).

Beaucoup d'élèves lui ont demandé d'où venait son inspiration et  pourquoi il dessinait en noir et blanc.

L'inspiration lui est quotidienne (il a toujours un carnet de croquis sur lui) certainement en buvant du maté ! Il est contemplatif, il s'inspire aussi de son enfance. Il a toujours aimé regarder le ciel la nuit, la lune, les étoiles, les constellations... que l'on retrouve dans ses dessins. Lorsqu'il écoute de la musique qu'il apprécie (Radiohead, The Cure, Pink Floyd...), il voit aussi des images qu'il a envie de transmettre.

Ces dessins, qu'il a besoin de coucher sur le papier,  une fois apparus, concrétisés lui procurent des moments de joie. Il a besoin de les communiquer, ce n'était pas le cas plus jeune car il se méfiait plus de la réaction des gens.

Ses dessins sont en noir et blanc, à l'encre de Chine car cela correspond plus à sa sensibilité. Cela transcrit plus l'absurde et la poésie. C'est ainsi depuis son enfance. Il peint parfois en couleur chez lui mais ne les publie pas.

Les rencontres se sont bien évidemment terminées par des jolies dédicaces.

 

Jeudi 7 décembre, Mme Dubruc a accueilli Jean-Christophe Potton. Celui-ci est intervenu salle Hippolyte Carnot auprès des élèves de Terminale Euro (Mme Dubruc), Terminale spécialité HGGSP (avec M. Gallant) et les TG6 (avec M. Vial).

Jean-Christophe Potton n'est pas écrivain à plein temps. Il publie depuis peu. Il a à son actif trois récits : La Piste Bernanos-Paraguay(2019), Le conseiller (2021), La Tisseuse d'Ao Po'i (2023).

Il est magistrat à la Cour des Comptes. Il a également enseigné à l'ENA.

Détaché au ministère des Affaires étrangères, il a été ambassadeur de France en Uruguay (2009-2013) puis au Paraguay (2014-2017).

Dans un premier temps, Jean-Christophe Potton a décrit son parcours (formation à l'ENA, Quai d'Orsay...) pour devenir haut fonctionnaire ainsi que sa nomination au poste d'ambassadeur (avec tout le protocole). Il a relaté également les missions d'un ambassadeur (diplomatie, économie, coopération -scientifique, culturelle, universitaire-, représentation de la France et protection des Français...),son vécu en Amérique latine avec quelques anecdotes.

Il a été enchanté de sa 1re nomination à Montevideo. Sa famille et lui-même se sont ces années-là passionnés pour l'Uruguay et l'Amérique du sud en général. La présence française est importante en Uruguay et la langue française est parlée par beaucoup (longtemps, le français était la langue étrangère obligatoire).

Uruguay et Paraguay sont 2 Etats très différents. L'Uruguay a un niveau de vie nettement supérieur, imprégné de culture européenne. Le Paraguay, bien plus pauvre, est le pays des réductions jésuites (missions Guaranis). La langue guarani y est une langue officielle avec l'espagnol. La culture guarani s'est répandue dans le pays. Le Paraguay est plus sauvage, inaccueillant mais cela a plu à "Monsieur l'ambassadeur" qui aimait s'aventurer à l'intérieur du pays à la rencontre des Indiens.

L'Uruguay était confortable mais le Paraguay beaucoup plus original, curieux.

Les trois livres de Jean-Michel Potton ont été présentés dans un second temps par les enseignants et l'auteur :

- La piste Bernanos-Paraguay par M. Gallant (roman policier)

- Le Conseiller par M. Vial. Son "héros" est nommé conseiller culturel à l'ambassade de Montevideo mais n'est pas à la hauteur et cumule les erreurs, bêtises. J.-C. Potton a voulu écrire un livre humoristique mais il a trouvé l'exercice vraiment trop difficile.

- La Tisseuse d'Ao Po'i par Mme Dubruc.

https://americanostra.wordpress.com/tag/editions-temporis/

A l'origine de l'histoire, une Française visiteuse de prison à Fleury-Mérogis est venue voir J.- C. Potton au Paraguay pour lui demander d'"arrêter le trafic de drogue", ce qui était un peu compliqué forcément !

Finalement, il écrira le roman pendant le confinement en 2-3 semaines. Le livre plaît plus aux femmes. Il s'est tellement mis à la place de la narratrice que certains pensent qu'il a été écrit par une femme...

J.-C. Potton continue l'écriture. Il ne veut rien révéler de plus sur son prochain roman à part que l'action ne se situera pas en Amérique du sud.

La rencontre s'est déroulée en présence de Christian Roinat, chroniqueur pour la revue Espaces Latinos, auteur du blog America nostra sur la littérature sud-américaine et des Caraïbes (voir lien plus haut)

Ces Belles Latinas se terminent. Elles ont donné lieu à la rencontre de trois auteurs aux personnalités très différentes mais tous attachants. Merci à Mme Dubruc, à Espace Latinos et rendez-vous en 2024 !

Texte : Mme Patruno

Photos : Mmes Dubruc et Patruno

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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